Charlotte de France (1516-1524)
Portrait de Charlotte de France par Jean Clouet
Charlotte est la deuxième fille de François Ier. Elle est morte en 1524 à l'âge de sept ans. C'est précisément à cette date que Jean Clouet a réalisé le portrait ci-contre.
La mort de la petite princesse semble avoir beaucoup peiné sa tante. Marguerite d'Angoulême était attachée à elle au point de la faire revivre ultérieurement dans l'un de ses textes. Dans Dialogue en forme de vision nocturne, l'âme de Charlotte lui apparaît et lui raconte son bonheur de vivre dans l'au-delà.
Dans les jours qui avaient précédé sa mort, Marguerite était la seule personne de la famille à veiller à son chevet. La mère de la petite, la reine Claude, était morte deux mois plus tôt, sa grand-mère Louise était malade et son père François était en campagne. On était quelques semaines avant la défaite de Pavie et la capture du roi par les Espagnols.
Une variante de ce tableau existe à Chicago dans une collection particulière.
Madeleine de France (1520-1537)
Portrait de la princesse Madeleine de France dessiné et peint par Jean Clouet vers 1524.
Source des images : Agence photographique de la Rmn (Chantilly, musée Condé) ; The Weiss Gallery (collection privée)
Madeleine est la troisième fille du roi François Ier et de la reine Claude. Sur ce portrait de la main de Clouet, elle est représentée vers l'âge de trois ans1.
Dans la version peinte, la princesse tient dans ses mains le hochet à dent de loup, caractéristique de cette époque. Après avoir « disparu » pendant la Seconde Guerre mondiale, le tableau est récemment apparu sur le marché de l'art2.
Portrait de Madeleine de France peint par Corneille de Lyon vers 1536.
Source de l'image : The Weiss Gallery (collection privée)
Ce très beau portrait de la princesse Madeleine est récemment apparu sur le marché de l'art. Il surpasse en qualité tous les autres autres portraits connus de la princesse. La finesse de son réalisme permet de l'attribuer au talent de Corneille lui-même.
Le portrait a été réalisé vers 1536. Il rappelle par le costume, celui de Catherine de Médicis, conservé au Polesden Lacey, ou encore celui du Fogg art museum que j'avais proposé d'identifier à la princesse Marguerite. A cause de la ressemblance physique des deux princesses, l'identification de ces portraits nécessite d'être confirmée. La confusion entre les deux dernières filles de François Ier reste possible3.
Portraits de Madeleine de France, reine d'Écosse, peints d'après Corneille de Lyon vers 1537
Source des images : Agence photographique de la Rmn (Versailles, musée du château) ; Agence photographique de la Rmn (anciennement à Blois, musée des Beaux-arts4)
Le 1er janvier 1537, Madeleine est mariée au roi Jacques V d'Écosse. Elle meurt la même année peu de temps après son arrivée en Écosse. Elle n'avait que seize ans seulement.
Le portrait original a probablement été réalisé avant son départ de la cour de France. Contrairement au portrait précédent, Madeleine est habillée dans l'habit traditionnel des dames de France avec des revers de manche doublés de fourrure. Selon l'auteur de la Weiss Gallery, la présence d'hermine soulignerait le caractère royal du modèle et donc le fait que Madeleine est dans ce portrait représentée en tant que reine.
C'est ce portrait qui est pris comme modèle dans le livre d'heures de Catherine de Médicis. Madeleine y est représentée en haut à droite, derrière la reine Claude qu'elle n'a jamais connue (image de gauche ci-contre).
L'effigie de Madeleine se trouve également à la basilique Saint-Denis. Elle est représentée à genoux en position de priante à un emplacement privilégié du tombeau de François Ier et de Claude de France ; la sculpture de la princesse est installée dans l'axe central derrière les effigies de ses parents (image de droite ci-contre).
Source des images : Wikimedia (Paris, Bibliothèque nationale de France) ; Regards des Monuments nationaux (Saint-Denis, basilique)
Article modifié le 05/04/2020
Notes
1. Sur les portraits au crayon de Madeleine d'après Jean Clouet, voir Alexandra Zvereva, « ... Louise de Savoie et les recueils de portraits au crayon », in P. Brioist (et al.), Louise de Savoie (1476-1531), Tours, Presses universitaires François-Rabelais, 2015, p. 183-204.
2. Il est mentionné comme porté disparu dans P. Mellen, Jean Clouet, catalogue raisonné, dessins miniatures et peintures, Paris, Flammarion, 1971. En 2007, il est mis en vente par la Weiss Gallery.
3. L'identification à Madeleine n'est pas soutenue par l'historienne Alexandra Zvereva qui semble y voir plutôt sa soeur Marguerite (voir la notice sur le site de la Weiss Gallery).
4. Le tableau a été volé et détruit en 1996 (affaire Stéphane Breitwieser). H. Lebédel-Carbonnel (dir.), Catalogue des peintures du musée du château de Blois. XVe-XVIIIe siècles, Montreuil, Gourcuff Gradenigo, 2008, p. 212.
Problème d'identification sur un portrait du duc d'Orléans

Il s’agit de ce très beau dessin de Clouet dont on trouve une variante au musée Condé à Chantilly (ci-contre).
Selon Zerner, il n'y pas lieu de douter de l'inscription identifiant le personnage placée en haut à droite sur le dessin : "Monsr Dorleans filz du roi François". Le problème est que ce titre peut aussi bien désigner Henri que son frère cadet Charles. A la mort du dauphin François en 1536, Henri alors duc d’Orléans était devenu dauphin et Charles alors duc d’Angoulême était devenu duc d’Orléans. Lequel de ces deux princes, le dessin de la BnF représente t–il ?
Ce qui fait douter Mr Zerner de l’identification traditionnelle, c'est que la ressemblance du jeune homme avec la physionomie d’Henri II n’est pas évidente. Le dessin de la BnF présente un nez busqué qu'on ne retrouve pas sur les autres portraits du roi. De plus, le personnage paraît un peu âgé pour représenter Henri qui cessa d’être duc d’Orléans à l'âge de 17 ans. Pour Zerner le dessin de la BnF représenterait donc Charles d’Orléans.
L’hypothèse est intéressante mais manque de preuves pour être définitivement acceptée.
Il existe un document qui permet d’apporter un éclairage primordial sur la question. C’est le folio 99v du livre d’heures de Catherine de Médicis (ci-contre). . On y retrouve le portrait du duc d’Orléans aux côtés de trois autres personnes apparentées à la famille royale. L’identification des ces trois autres personnages peut permettre, au moyen de la déduction, d'identifier le nom de la personne cachée sous ce fameux duc d’Orléans.
Il est aujourd'hui acquis que le personnage central de la miniature soit le dauphin François et que le personnage de droite soit le duc de Savoie Emmanuel-Philibert époux de Marguerite de France. En revanche, le petit garçon représenté au premier plan n’a jamais fait l’objet d’une identification assurée.
Permettez-moi de présenter ici trois hypothèses ; elles sont essentielles quant à la réflexion sur le dessin duc d’Orléans :
L’hypothèse traditionnellement admise :
Puisque les personnages représentent les fils et le gendre de François Ier, on a estimé par déduction que le petit garçon représenté au premier plan du folio est Charles d’Orléans. Le problème c'est que le portrait de la miniature ne renvoie à aucun dessin connu de lui. En outre, pourquoi l’avoir représenté enfant alors qu’il existe des portraits de lui plus âgé et que ses frères sont représentés adultes ?
C'est finalement Henri Zerner qui apporte à cette énigme la solution la plus vraisemblable.
L’hypothèse d’Henri Zerner :
Pour lui, le petit garçon serait Charles-Emmanuel de Savoie, le fils unique d’Emmanuel-Philibert et la comparaison physionomique des portraits semble lui donner raison. Il existe à la galeria Sabauda de Turin, un tableau du prince réalisé vers 1570 et qui présente la même tête que le petit garçon du livre d'heures (ci-contre).
La présence du petit prince de Savoie dans le livre d’heures de sa tante n’est pas étonnante. Catherine de Médicis et Marguerite de France étaient particulièrement proches. Catherine n’était pas uniquement la belle-sœur de Marguerite mais aussi son amie intime. Les deux femmes étaient inséparables. On prétend toujours que Catherine de Médicis était une femme de pouvoir qui se mêlait de tout, mais rien n’était plus vrai qu’en ce qui concernait le mariage et la vie conjugale de sa belle-sœur. A sa décharge, Catherine avait un droit de regard en tant que reine et gouvernante de France. La paix en Europe s’était construite sur ce mariage. Du fait des guerres d’Italie encore récentes, les enjeux diplomatiques étaient considérables et Catherine de Médicis attendait la naissance d’un héritier savoyard avec beaucoup d’impatience.
Hélas on ne peut pas s’empêcher de déplorer au regard de l’histoire la présence de Charles-Emmanuel et de son père dans le livre d’heures de Catherine. Quelle ironie du sort pour elle qui a toujours cherché à cultiver l’amitié des princes de Savoie alors que ces derniers n’ont jamais cessé de se moquer des Valois, de les salir et de profiter des guerres de religion pour grignoter des petits bouts du royaume de France. Catherine de Médicis avait beau être clairvoyante, sa vision hyper sacrée de la famille l'avait bien aveuglé quant aux sentiments francophobes de la maison de Savoie.
J’espère que vous me pardonnerez ce petit intermède qui permet de resituer le contexte familial et politique dans lequel le livre d'heures a été conçu ; je reviens donc sur notre dessin et sur l’hypothèse formulée par Henri Zerner à l’occasion du colloque de 1997. Puisque Charles n’est pas le petit garçon représenté au premier plan de la miniature, ce serait lui qui serait représenté à gauche dans les traits de ce fameux Mons Dorleans.
Zerner en conclut donc que le dessin de la BnF représente Charles et non le futur Henri II.
C’est ici que je me permets d’intervenir. Charles d’Orléans est bien présent dans le livre d’heures de Catherine de Médicis mais sur un autre folio (ci-contre). La base de données de la BnF identifie le personnage représenté au folio 209 comme étant François d'Alençon. Il s'agit en réalité de la reprise d'un portrait de Charles d'Orléans peint par Corneille de Lyon et se trouvant aujourd’hui au musée des Offices.
Charles d’Orléans peut-il être représenté deux fois dans le livre d’heures de Catherine ? On peut en douter. On peut donc considérer que le portrait du duc d’Orléans représente bel et bien le futur Henri II.
Conclusion
Le dessin de la BnF représentant le duc d’Orléans peut aussi bien représenter Henri et Charles, respectivement le deuxième et troisième fils de François Ier. Toutefois au vue des différents personnages représentés dans le livre d’heures de la reine Catherine, l’hypothèse traditionnelle qui voit en lui le futur Henri II reste encore vraisemblable.
Dans le catalogue consacré au Clouet, Alexandra Zvereva avait elle-même repris l'identification traditionnelle. Elle ajoute concernant le livre d’heures de Catherine, qu’en choisissant ce portrait, la reine aurait voulu avoir avec elle l'image de son époux tel qu'il était à l’époque de leur mariage2.
C'est enfin un portrait qui doit être mis en relation avec le portrait équestre de la Menil collection dont l'existence apporte un argument supplémentaire à l'identification traditionnelle.
Notes
Marguerite de France (1523-1574)
Portrait de Marguerite de France vers 1527
Marguerite est la dernière enfant de François Ier et de Claude de France. Elle n'a pas connu sa mère qui est morte peu de temps après sa naissance.
Son éducation s'est faite à la cour du roi François sous l'influence de sa tante Marguerite. De cette parenté, elle garda un goût pour les Lettres et un esprit humaniste.
De tous les enfants de François Ier, c'est celle qui vécut le plus longtemps. On a donc beaucoup de portraits d'elle, et ce d'autant plus qu'elle était aimée du roi son père et du roi son frère. Jean Clouet l'a représenté ici vers l'âge de quatre ou cinq ans.
Source : Rmn (Chantilly, musée Condé)
Il existe un portrait de Corneille de Lyon représentant une jeune fille dont les traits ne sont pas sans rappeler la princesse Marguerite. Elle porte un costume semblable à celui que porte à la même époque Catherine de Médicis (qui était pour Marguerite à la fois une belle-soeur et une amie proche). Je m'avance beaucoup en proposant ce portrait comme étant celui de Marguerite. Anne Dubois de Groer qui l'a relevé dans son catalogue raisonné l'a laissé sans identification1. La jeune fille devait avoir une douzaine d'années quand ce tableau a été peint en 1536, ce qui correspond à l'âge du modèle.
Source : (Cambridge (EU), The fogg art museum)
Portrait de Marguerite vers 1542 et 1545
Marguerite est représentée vers l'âge de 18 et 22 ans. Si la princesse fit plusieurs fois l'objet de négociations matrimoniales, elle refusa toujours de faire alliance avec un petit parti. Fille et soeur de rois, elle avait la volonté de n'épouser qu'un souverain ou un fils de roi. L'exigence de ses revendications la laissa célibataire pendant de nombreuses années.
Source : Rmn et Rmn (Chantilly, musée Condé)
Estampe représentant Marguerite de France (ci-contre)
Source : (Amsterdam, Rijkmuseum)
Portrait présumé de Marguerite d'après Corneille de Lyon
D'après Anne Dubois de Groer, ce portrait n'est pas un original ; ce qui explique que son identification à Marguerite n'est pas évidente2. Il existe un portrait équivalent au château de Versailles.
Le portrait a probalement été réalisé au début du règne d'Henri II. Faute de trouver un époux de son rang en Europe, la soeur du roi vit à la cour de France. Pour l'entretien de son rang et de sa maison, Henri II lui a donné en jouissance le duché de Berry.
Source : Rmn (Chantilly, musée Condé)
Portrait de Marguerite par François Clouet vers 1550
La pose solennelle donnée par le portraitiste à son modèle et la beauté du costume que laisse transparaître l'esquisse fait de ce dessin un très beau portrait de la duchesse de Berry. Un autre dessin de Chantilly semble s'apparenter avec lui (image ci-dessous).
A 25 ans passés, Marguerite est par son esprit et son affabilité une figure appréciée de la cour de France et de la famille royale.
Source : Rmn et Rmn (Chantilly, musée Condé)
Portrait de Marguerite de Berry dessiné par François Clouet vers 1555
Ce très beau portrait est le dernier représentant Marguerite en costume de cour, avant son départ de France. Le portrait peint du dessin n'est réapparu qu'en 2011, en vente chez Christie's. La princesse est tout de blanc vêtue.
A 30 ans passés, la fille de France n'est toujours pas mariée. Peut-être, le portrait est-il tiré pour doper la cote de la princesse et augmenter le nombre des prétendants.
Peut-être, le portrait est-il tiré à l'occasion des préparatifs de son mariage avec le prince de Savoie qui a lieu en 1559. L'idée avait germé les années précédentes, mais du fait de la guerre, elle était prématurée.
Par ailleurs, la princesse exigeait d'être mariée à un roi. Emmanuel-Philibert n'était que duc et dépossédé de ses états par la France. Mais ça, c'était avant la défaite française de 1557. La proposition de mariage s'inscrit dans les négociations du Traité du Cateau-Cambrésis qui visait la création d'un nouvel état à cheval sur les Alpes comprenant la Savoie et le Piémont. C'était la résurgence du duché de Savoie, avant son annexion à la France par François Ier.
En 2012 une variante du tableau, est apparue en vente dans la même maison (ci-contre).
Source des images : Agence photographique de la Rmn (Chantilly, musée Condé) ; Christie's (Vente du 1er novembre 2011 à Amsterdam) ; Akg (Christie's, vendu le 1er avril 2012 à Londres)
Le portrait de Clouet a servi de modèles à deux miniatures d'un livre d'heures ayant appartenu à la princesse. L'ouvrage est aujourd'hui conservé à Turin. L'une de ces miniatures la représentent avec le dragon de Sainte Marguerite d'Antioche.
Le portrait a servi de modèle pour la miniature (ci-contre à droite) représentant les filles et épouses de François Ier dans le livre d'heures de Catherine de Médicis. Marguerite y est la seule personne à placer son regard vers le lecteur (à l'époque de la réalisation de cette miniature dans les années 1570, elle est l'une des rares figures représentées à être encore vivante).
Source des images : Le lys et la soie : ... (Turin, Biblioteca Reale) ; Compte instragram du musée royal de Turin (Turin, Biblioteca Reale) ; Wikimedia (Bibliothèque nationale de France)
Marguerite apparaît également sur une fresque du château de Caprarola représentant les noces de sa nièce Diane avec Horace Farnèse en 1553. Elle est representée derrière la mariée, à gauche du groupe central (représentée en couleur sur l'image ci-contre). Sont également représentés son frère Henri II et la reine Catherine.
Source de l'image (détail de la fresque) : Akg-images (Caprarola, Palais Farnèse)
Représentation allégorique de Marguerite en Minerve vers 1555 sur une plaque en émail réalisé par Jean de Court
Ce très bel ouvrage en émail rappelle que la princesse Marguerite était une femme lettrée, protectrice des écrivains.
Les poètes de la Pléiade comme Ronsard et Du Bellay ont célébré Marguerite comme étant la nouvelle Pallas (ou Minerve), la déesse de la sagesse, protectrice des arts et des sciences. Comme son père autrefois (manuscrit de la Bibliothèque nationale de France), elle est représentée sous les traits d'une divinité de la mythologie grecque. Marguerite est la personnalité qui défend l'art des Lettres contre les sectaires ignorants.
Marguerite de France passe également pour avoir été sympathisante des idées de la réforme protestante.
Source de l'image : (Londres, Wallace collection)
Notes
1. Anne Dubois de Groer, Corneille La Haye, dit Corneille de Lyon, Arthéna, 1997, p. 264.
2. Ibid, p. 213.
Article modifié en octobre 2011
Deux portraits de Marguerite en deuil blanc par François Clouet en 1559
Ironie du sort pour Marguerite, c'est à quelques jours de son mariage avec le prince de Savoie Emmanuel-Philibert, en juin 1559, que le roi Henri II fut mortellement blessé au cours du fameux tournoi des Tournelles. Au seuil de sa mort, craignant que le prince savoyard ne se dérobe à ses engagements, le roi obligea la tenue immédiate du mariage. Les enjeux géopolitiques de cette alliance étaient considérables. La cérémonie a donc lieu, .. dans les pleurs. La reine Catherine qui avait tant désiré et attendu ce moment, était tombée malade sous le coup de l'émotion de l'accident de son mari. Elle n'assiste même pas au mariage. Le roi meurt dans la nuit même.
Le portrait représente Marguerite arborant pour son frère le deuil blanc. Il s'agit du dernier portrait avant le départ de la princesse pour la Savoie.
Parce qu'il était impossible pour Marguerite de quitter la France sans avoir participé au deuil de la cour et encore moins en abandonnant son amie Catherine et ses enfants dans une situation aussi malheureuse, son départ pour la Savoie fut plusieurs fois reporté. Catherine de Médicis avait également obtenu le report du départ de la reine d'Espagne à laquelle elle était aussi attachée.
Marguerite ne quitta la France qu'au mois de décembre 1559. Elle fit son "entrée" dans la bonne ville de Nice et y resta le temps de recouvrer la santé, car les nouvelles de France qui lui parvenaient au sujet de la crise religieuse et des évenements d'Amboise l'affectaient beaucoup.
Source des images : (Londres, The British museum) et idem ; et en copie (Royaume-Uni, Royal Collection) ; (Turin, Galerie Sabauda)
Portraits de la duchesse de Savoie d'après un original perdu
Les trois tableaux représentent la duchesse dans un portrait probablement fait en Savoie (le portrait original est inconnu mais il subsiste sous forme de copies dont une très belle gravure1).
On peut faire le rapprochement de ces tableaux avec un dessin de la BnF identifié à tort à Marguerite de Parme (image ci-contre).
Epouse d'un prince officiellement allié à la France, Marguerite se fit remarquer par son amabilité et ses interventions pour tenter d'apaiser les tensions dans le nord de la péninsule italienne. Elle sut maintenir son époux pourtant tout dévoué à l'Espagne, dans une amitié - très fragile - avec la France.
Source des images : Arcadja2 ; (Vienne, Kunsthistorisches museum) ; BeniCulturali (Château royal de Racconigi) ; Gallica (Paris, Bibliothèque nationale de France) ; Wikimedia (Turin, Galleria Sabauda)
Portrait de Marguerite peint au XVIIe siècle et conservé au palais ducal de Venaria Reale près de Turin.
Le portrait est une copie du portrait peint vers 1560-1565 et aujourd'hui perdu. Il représente la duchesse de Savoie en pied. Sa présence dans le palais ducal de Turin rappelle la place et l'importance de cette princesse de France dans la généalogie des princes de la Maison de Savoie qui devinrent rois d'Italie, au XIXe siècle.
Turin, place forte française depuis la campagne menée par François Ier en 1536 faisait partie de la dot de Marguerite. La capitale du Piémont devait être rendue au duc de Savoie, à la condition que Marguerite mît au monde un héritier mâle. C'est ce qui arriva en 1562 avec la naissance de Charles-Emmanuel. Les soldats français évacuèrent la place et Turin devint la capitale du duché, au détriment de Chambéry.
Marguerite se faisait beaucoup de soucis pour son pays natal, meurtri par les guerres de religion. Plus tard, Charles-Emmanuel, son fils tant désiré devint duc de Savoie à la mort de son père (1580). Il n'eut toutefois aucun scrupule pour agrandir son état au détriment du royaume de France. Henri IV et Louis XIII durent mener à plusieurs reprises des campagnes contre son état pour étouffer ses ambitions.
Source des images : (Venaria Reale, palais ducal) ; BeniCulturali (Château royal de Racconigi)
Notes
1. Dana Bentley-Cranch, « L'iconographie de Marguerite de France », in Culture et pouvoir au temps de l'humanisme et de la Renaissance. Actes du Congrès Marguerite de Savoie, Paris, Slatkine, 1978, p. 243-256. Voir également Alexandra Zvereva, Les Clouet de Catherine de Médicis : chefs-d’œuvre graphiques du musée Condé, Paris, Somogy, 2002, p. 114.
2. L'oeuvre a été vendue aux enchères sous une autre identification. Par comparaison avec le portrait du Kunsthistorisches museum et avec la gravure précédemment citée, l'erreur paraissait évidente..
Article modifié en février 2014
Quelques exemples sur le marché de l'art
Le marché de l'art n'échappe pas aux erreurs d'identification. Il suffit qu'un homme soit peint à la mode de Charles IX pour qu'il soit aussitôt identifié au roi. C'est le cas de ce très beau portrait (ci-contre) présenté pour être celui du jeune souverain. L'existence d'une copie dans les collections autrichiennes (ci-dessous) nous permet de proposer une identification plus certaine : Charles de Téligny.
Téligny était le gendre de l'amiral de Coligny. A l'issue de la troisième guerre de religion, il était employé par son beau-père pour négocier la paix avec la couronne. Téligny faisait partie de ces protestants qui poussaient Coligny à faire confiance au roi et à monter à la cour. Il fut massacré durant la Saint-Barthélemy.
Source : Artvalue (Drouot/juin 2000)
Source : (Vienne, Kunsthistorisches museum)
Le portrait suivant (ci-contre) a également été transmis par le passé comme représentant le jeune roi Charles.
Il est encore plus facile de corriger l'erreur d'identification, car les collections publiques possèdent plusieurs exemplaires de ce portrait. Le British museum en possède même le dessin original. Il s'agit de Jacques de Savoie, duc de Nemours.
Le duc de Nemours était un prince de la maison de Savoie et un parent de la famille royale. Fortement lié aux Guise, il combattait dans le camp catholique pendant les guerres civiles. Il nous est surtout connu pour la réputation de son charme et le couple glamour qu'il forma avec Anne d'Este.
Source : Artvalue (Palais Dorotheum/mars 2001)
Source : (Londres, British museum) ; Rmn (Chantilly, musée Condé) ; Rmn (Chantilly, musée Condé)
Je profite de l'évocation de l'iconographie de ce personnage pour mentionner l'erreur dans l'identification d'un petit portrait équestre exposé aujourd'hui au musée Condé (ci-contre). Je l'avais moi-même présenté sur ce blog comme étant le duc d'Anjou (je l'ai retiré depuis), mais Alexandra Zvereva l'a - avec raison - identifié au duc de Nemours1. A y regarder de près2, le visage du portrait équestre reprend les traits de Nemours dans son tableau de Chantilly (ci-dessus).
Source : Rmn (Chantilly, musée Condé)
Je terminerai cet article par mentionner ce portrait présumé du roi Henri II (ci-contre). Là encore, il en existe plusieurs portraits semblables qui permettent de corriger avec évidence son identification.
Le portrait représente en réalité l'un des plus importants familiers du roi : François de Lorraine, duc de Guise.
François de Lorraine était le premier époux d'Anne d'Este. Il fut un des piliers de la cour au commencement des guerres de religion. Du fait de sa célébrité et de la grandeur de sa maison, de nombreuses copies ont été faites de ses portraits. Il ne serait pas étonnant qu'elles aient eu parfois la valeur d'icône du fait de la réputation du prince après son assassinat par un protestant en 1563. Son image ne doit pas être confondue avec celle de son fils, Henri de Guise lui aussi assassiné et lui aussi entouré d'un aura de prestige.
Source : Artvalue : (Tajan/décembre 2003)
Source : (Paris, BnF) ; (Vienne, Kunsthistorisches museum) ; (Vienne, Kunsthistorisches museum)
Notes
1. Musée Condé, Les miniatures du musée Condé à Chantilly, Portraits des maisons royales et impériales de France et d’Europe, Paris, Somogy, 2007, p. 210. Il me semble avoir aperçu sur un site de vente d'oeuvres d'art, un tableau semblable représentant le duc de Guise, François, premier époux d'Anne d'Este. Il reprenait les traits du dessin de la BnF (ci-desus). Je regrette de ne pas en avoir pris la référence.
2. Ce qui nous est impossible de faire avec la petite reproduction photographique ici présentée.
Portrait présumé de Louise de Lorraine (?)
Il s'agit d'un portrait assez étrange. La femme représentée porte une coiffe du début des années 1600. Louise de Lorraine étant morte en 1601, il s'agirait donc d'un portrait réalisé à l'extrême fin de sa vie.
En dépit de l'inscription placé en haut du dessin, je suis sceptique quant à l'identité de cette femme. Devenue veuve, Louise de Lorraine avait choisi de porter le deuil et de vivre solitaire. Il me paraît difficile de l'imaginer sans un voile et avec un décolleté si ouvert.
Il faut reconnaître que le visage n'est pas sans rappeler Louise. A côté du précédent portrait, Louise a grossit. Plus de quinze ans séparent les deux portraits. Louise devrait avoir ici près de cinquante ans. Mais je reste sceptique.
Source : Base Joconde (Paris, musée du Louvre)
Charles d'Angoulême (1573-1650)
Portrait de Charles bâtard de France
Source de l'image : Vienne, Osterreichische nationalbibliothek
Charles est le fruit des amours illégitimes du roi Charles IX et de Marie Touchet, fille d'un officier de justice de la région d'Orléans.
Le bâtard est né le 28 avril 1573. Orphelin de père un an plus tard, il est placé sous la tutelle de sa grand-mère Catherine de Médicis et de son oncle, le roi Henri III.
Comme le veut la tradition, il est élevé comme un prince de la maison royale. Pendant six ans, il grandit au château d'Amboise aux cotés de sa demi-soeur Marie-Elisabeth, d'un an son cadet. Catherine de Médicis et Henri III les visitaient parfois et se sont pris d'affection pour les deux enfants.
Marie-Elisabeth mourut en 1578 à l'âge de 5 ans. L'année suivante, au sortir de la petite enfance, quand l'âge vient pour les petits garçons de s'habiller comme des adultes, Charles est emmené à Paris. Désormais, il vit aux côtés de sa grand-mère et du roi son oncle. Dans cette famille, où la culture et les arts du spectacle sont importants, Charles bénéficia d'une excellente éducation.
La gravure représente le prince vers 1580-1585.
Portrait en pied d'un prince de la dynastie des Valois conservé à la Villa médicéenne de Poggio a Caiano
Source de l'image : Wikimedia Commons (Villa médicéenne de Poggio a Caiano)
L'image a été téléchargée sur Wikimedia Commons en 2012. Le portrait n'est ni identifié, ni daté.
Il représente un jeune homme de la cour, habillé à la mode des années 1580 ; un jeune prince habillé à la mode Henri III ? La comparaison des visages semble étayer l'identification au bâtard d'Angoulême (yeux cernés, nez assez long).
La présence de ce portrait à la Villa médicéenne de Poggio peut s'expliquer par la transmission des collections de Catherine de Médicis à sa petite-fille Christine de Lorraine. Lorsque celle-ci épousa en 1589 le grand-duc de Toscane, Christine emporta avec elle une grande partie des collections de portraits de la reine-mère. La Villa médicéenne de Poggio a Caiano était l'une des résidences d'été des grands-ducs de Toscane et a pu abriter une partie de ces collections.
Le prince bâtard connut une faveur croissante à la cour. En grandissant, il montrait un goût certain pour les soirées festives, et une aisance en société qui le faisait apprécier du roi.
Henri III le traitait comme son fils. Il l'estimait au point que Charles rivalisait en faveur avec les deux archifavoris en titre, Joyeuse et Epernon. Dans les quinze derniers mois du règne, le bâtard devint - avec Roger de Bellegarde - le nouveau favori, remplaçant les deux archimignons déchus.
Il fut question d'en faire l'héritier du trône. L'absence de dauphin et la reprise de la guerre autour de la succession royale avaient poussé Catherine de Médicis à proposer cette solution au roi. Il semble que celui-ci ait hésité à faire du bâtard son successeur. Mais Henri III, prince consciencieux et respectueux de la loi, avait finalement rejeté cette idée contraire à la tradition.
La fin du règne approchait et avec lui la fin des Valois. En quelques mois, les évènements s'accélèrent ; le 1er août 1589, Henri III est assassiné par Jacques Clément ; pendant son agonie, le jeune Charles est à son chevet, tout en larmes. Pour la deuxième fois consécutive, il devient orphelin. Catherine de Médicis était décédée quelques mois plus tôt. Elle lui avait légué toutes ses possessions ; Charles était désormais comte d'Auvergne et l'héritier bâtard d'une dynastie disparue.
Portrait au crayon de Charles, comte d'Auvergne dessiné vers 1600 par Benjamin Foulon et conservé au musée de l'Ermitage de Saint-Pétersbourg
Source de l'image : Saint-Pétersbourg, musée de l'Ermitage
Le prince est représenté à l'âge de 25 ans environ. Il porte un collet monté dans une forme qui permet de le dater vers 1600, c'est-à-dire peu de temps avant son embastillement.
A la mort d'Henri III (1589), Henri IV avait pris le bâtard d'Angoulême sous sa protection. Charles l'avait reconnu comme roi et s'était battu pour lui aux batailles d'Arques et d'Ivry.
Charles se rangea très tôt dans le rang des grands seigneurs mécontents et participa aux complots de la noblesse pour évincer Henri IV. C'était un prince qui menait joyeuse vie à la cour, participant aux festivités, mais proche d'une infatigable comploteuse, Henriette d'Entragues, la maîtresse du roi. Elle était sa demi-soeur, fruit de leur mère Marie Touchet et de François de Balzac d'Entragues.
Charles avait un motif de mécontentent : le procès que lui faisait sa tante Marguerite de Valois pour récupérer l'héritage des Valois dont sa mère Catherine l'avait dépossédée au profit de Charles : le comté d'Auvergne.
Ayant perdu ses procès, Charles intrigua contre le roi et perdit sa faveur. En 1604, il participa au complot de sa soeur ; fugitif, pourchassé, capturé, jugé et condamné à mort, Charles fut mis à la Bastille où il demeura jusqu'à en 1617.
Au château de Beauregard, il existe un portrait très intéressant du prince (ci-contre à droite). Charles est représenté dans la galerie des illustres avec les autres personnalités du règne d'Henri IV. La curiosité de ce portrait est que le comte d'Auvergne est peint de profil et habillé à l'antique. C'est un témoignage du caractère divertissant et lettré du prince qui fut aussi créateur et producteur de ballets. A la cour d'Henri IV, Charles de Valois s'impliquait personnellement pour préserver la grande tradition du spectacle. En digne héritier de Catherine de Médicis, il entretenait le souvenir regretté de l'atmosphère festive de la cour des Valois.
Source de l'image : Gettyimage (Château de Beauregard)
Représentation de Charles de Valois, duc d'Angoulême sur une gravure de Crispin de Passe, tirée du fameux manuel d’équitation, d'Antoine Pluvinel, L'Instruction du Roy en l'Exercice de Monter à Cheval
Source de l'image : (Bibliothèque nationale de France)
Le prince bâtard demeura en prison pendant quatorze ans, dans des conditions et un confort dignes d'un prince. Sa tante Diane de France, duchesse d'Angoulême ne ménageait pas ses efforts auprès du roi pour atténuer ses conditions de vie et obtenir sa libération. Elle l'obtint du jeune roi Louis XIII en 1616.
A la mort de sa tante Diane, survenue deux ans plus tard (en 1619), Charles, dernier représentant des Valois, hérita de ses biens : il devient duc d'Angoulême.
Portrait en médaillon de Charles de Valois sculpté par Guillaume Dupré en 1620
L'image est contemporaine de la gravure de Crispin de Passe. Le nouveau duc est représenté alors qu'il approche de la cinquantaine.
Source de l'image : (New York, The Frick Collection)
Portrait de Charles de Valois, duc d'Angoulême dessiné d'après Daniel Dumonstier
Source : Drouot (vente du 1er avril 2020, Paris). ; Daniel Lecœur, Daniel Dumonstier (1574-1646), Arthena, 2006 (Waddesdon manor, Royaume-Uni)
L'image en couleur été vendue récemment chez Drouot (2020).
Bien qu'il soit en partie coupé, il est identique au crayon de Daniel Dumonstier (présenté tel quel dans la monographie de Daniel Lecoeur) qui est conservé au manoir de Waddesdon (ci-dessous).
Le prince est représenté dans les années 1630, à soixante ans passés. Il porte le grand rabat de dentelle.
Après avoir passé plus de 10 ans en prison, le prince Charles se montra fidèle au roi. Louis XIII l'employa au siège de La Rochelle où il lui confia l'un des commandements de l'armée royale, honneur réservé aux princes et aux Grands.
Portrait du duc d'Angoulême, peint vraisemblablement par Philippe de Champaigne au début du règne de Louis XIV
L'image est la photographie en noir et blanc d'un portrait dont le style soigné donne à croire qu'il s'agit d'une oeuvre peinte par Philippe de Champaigne. La précision des détails dans le rendu de la matière étaye cette hypothèse.
La photographie est conservée à la BnF, mais la localisation du tableau n'est pas mentionnée (source de l'image : Bibliothèque nationale de France).
C'est le dernier portrait du prince avant sa mort. Il le représente dans les années 1640, avec un col et une mouche dans le style de cette époque. Le portrait le représente dans ses fonctions d'homme de guerre. Il porte sur son armure, l'étoffe blanche des commandants militaires.
Charles d'Angoulême meurt à l'âge de 77 ans. Il a traversé les époques pour mourir sous le règne de Louis XIV. Lui qui aurait pu monter sur le trône, a servi successivement 4 rois.
Le portrait de Champaigne a été reproduit à plusieurs reprises par des graveurs et recopié en peinture.
Il en existe des copies dans les galeries privées dont celle du château de Bussy-Rabutin.
Le dessin original de Philippe de Champaigne (ci-contre à gauche) a été vendu aux enchères.
Source des images : Artnet (Collection privée) ; Regards des monuments nationaux (Château de Bussy-Rabutin) ; (Château de Skokloster, Suède)
Portrait de Charles de Valois, duc d'Angoulême, gravé par Jean Morin d'après l'oeuvre de Philippe de Champaigne
Source de l'image : (The royal collection, Royaume-Uni)
Le portrait a été réalisé d'après l'oeuvre de Philippe de Champaigne dont Jean Morin était probablement l'élève.
L'image a été reproduite à de nombreuses reprises par les maîtres graveurs du milieu du XVIIe siècle, dont Gilles Rousselet et Pierre Daret (images ci-dessous).
Des tirages de ces oeuvres sont aujourd'hui conservés dans de nombreuses collections institutionnelles ; pour n'en citer que quelques uns : la Bibliothèque nationale de France, le château de Versailles, la Royal Collection du Royaume-Uni.
Source : (Bibliothèque nationale de France) ; (The Royal collection, Royaume-Uni) ; (Bibliothèque nationale de France) ; (Bibliothèque nationale de France) ; (Bibliothèque nationale de France) ; (Bibliothèque nationale de France)
Statue funéraire de Charles de Valois, duc d'Angoulême conservée à l'hôtel Lamoignon
Source : Wikimedia Commons (Hotel Lamoignon, Paris)
Cette statue funéraire est aujourd'hui conservée dans l'ancien hôtel particulier du prince, situé dans le Marais à Paris. On peut l'y voir dans une petite pièce située à l'intérieur de la cour, à coté du porche d'entrée, où se trouve également la statue funéraire de Diane de France. Les deux bâtards de la dynastie des Valois, derniers représentants de leur famille sont ainsi réunis de façon symbolique.
L'hôtel Lamoignon constitue l'un des rares et beaux vestiges de la vie princière sous Henri III. Il a été construit par Diane de France dans ce quartier considéré comme neuf et rupin à l'époque. Commencé sous Henri III, le chantier s'est arrêté à cause de la Ligue ; fidèle conseillère de son frère, Diane avait été contrainte de s'exiler de Paris. Les travaux reprirent avec le retour d'Henri IV. A la mort de la duchesse en 1619, l'hôtel passa par héritage à son neveu.
C'est à l'église du couvent des Minimes situé à proximité de leur hôtel que Diane et Charles furent enterrés. L'église est détruite au XVIIIe siècle, mais les statues funéraires ont été sauvées.
Claude de France (1499-1524)
Fille aînée du roi Louis XII et d'Anne de Bretagne, Claude de France est une princesse de France née en 1499. En épousant son cousin, François d'Angoulême, appelé à devenir en 1515, le roi François Ier, elle assure la continuité dynastique de la monarchie. Elle contribue à cette continuité en donnant le jour à sept enfants, qu'elle met au monde en l'espace d'une dizaine d'année. Elle meurt en 1524, à l'âge de 25 ans seulement. Sa mort précoce explique la rareté de ses portraits.
Représentation enluminée de Claude de France, enfant, dans son livre d'heures, aujourd'hui conservé au musée de l'université de Cambridge
La scène la représente sur un prie-Dieu, encadrée de saint Claude, sainte Anne et de la vierge Marie enfant.
Le livre d'heures de Claude de France a été réalisé entre 1505 et 1510. Il s'agit d'un cadeau d'Anne de Bretagne à sa fille unique. Pour l'historienne Elizabeth L'Estrange, il marque la volonté d'une mère soucieuse de transmettre à sa fille les valeurs religieuses que sont les siennes1.
Le même ouvrage contient une autre enluminure mettant en scène Claude de France, mais quasi semblable à la première (les deux saints ont interverti leur place, et Claude est agenouillée devant la vierge Marie et sa mère).
Source : (Cambridge, The Fitzwilliam museum)
Représentation enluminée de Claude de France dans la scène de dédicace d'un livre commémorant les funérailles de sa mère Anne de Bretagne
Il s'agit d'un livre commandé par le roi Louis XII pour mettre par écrit le récit des célébrations solennelles qui furent organisées à la mort de la reine Anne. L'ouvrage est destiné à diffuser auprès des princes de la chrétienté le déroulement de ses funérailles et leur magnificence royale2.
La scène de dédicace met la princesse Claude à l'honneur, lui dédiant une place qui aurait pu être celle de son père. Elle fait rappeler à la jeune fille le poids de l'immense héritage qui est le sien ; Claude n'est pas seulement une fille de France, elle est aussi l'héritière du duché de Bretagne, dont elle est désormais la duchesse.
Anne de Bretagne meurt en 1514. Claude est représentée vers l'âge de treize ans environ ; elle deviendra reine de France l'année suivante.
Source : (Paris, Bibliothèque nationale de France)
Représentation enluminée de Claude de France dans les chroniques de Louis XII
La scène représente ses fiançailles avec son cousin François, le 21 mai 1506. De part et d'autre des fiancés, se tiennent leurs mères respectives, Anne de Bretagne et Louise de Savoie3.
Les visages ne sont pas individualisés, pas plus qu'il n'y a de réalisme dans la taille des personnages.
Source : (Paris, Bibliothèque nationale de France)
Représentation enluminée de Claude de France dans Le Sacre, couronnement et entrée de Madame Claude Royne de France
Il s'agit d'un ouvrage enluminé vers 1517 dédié à la reine Claude.
L'ouvrage conservé à la British Library a probablement été peint par Jean Coene IV, le même enlumineur qui a peint l'ouvrage sur les funérailles de la reine Claude conservé à la Bibliothèque nationale de France. Tout comme celui-ci, les traits des personnages ne sont pas individualisés. A défaut de portrait, les représentations enluminées de la reine ne rendent pas compte de sa physionomie.
Le livre contient plusieurs enluminures consacrées à la reine dont l'une représente la cérémonie du sacre. La reine assise sous un dais, face à l'autel et entourée de sa cour est déjà couronnée.
Source : (Londres, British Library)
Représentation de la reine Claude dans la scène de dédicace du Roman de Palamon et Arcita, écrit par Anne de Graville vers 1521
Anne de Graville était une femme de lettres, auteur de plusieurs oeuvres littéraires et poétiques. Tombée dans l'oubli, Anne de Graville était très connue de ses contemporains. Issue d'une famille proche de la cour, elle était une dame d'honneur de la reine Claude, et devint après la mort de sa maîtresse une intime de Marguerite de Navarre4.
La scène la représente en train d'offrir son ouvrage à la reine, qui le lui aurait commandé.
L'image est tiré d'un exemplaire du roman conservé à la bibliothèque de l'Arsenal (il en existe aujourd'hui six copies manuscrites4).
Source : (Paris, Bibliothèque nationale de France)
1. Elizabeth L'Estrange, "Le mécénat d'Anne de Bretagne", dans Patronnes et mécènes en France à la Renaissance, Publications de l'Université de Saint-Etienne, 2007 p. 192-193.
2. Elizabeth A. R Brown, Cynthia Jane Brown, Jean-Luc Deuffic, Michaël Jones, etc. Les funérailles d'une reine : Anne de Bretagne (1514) / "Qu'il mecte ma povre ame en celeste lumiere", Brepols, 2013.
3. Anne-Marie, François Ier imaginaire, symbolique et politique à l'aube de la Renaissance française, Paris, Macula, 1987, p. 53-56.
4. http://siefar.org/dictionnaire/fr/Anne_Malet_de_Graville
Article posté initialement le 05 décembre 2007
Portrait de la royne Claude conservé au musée du Louvre
Source : Agence photographique de la RMN
Les seuls portraits existants de la reine Claude sont des reproductions d'un dessin original de Jean Clouet aujourd'hui disparu.
Bien que très dépouillé, le portrait conservé par le musée du Louvre, est le plus intéressant au regard de la vraisemblance.
Les autres copies, réparties dans différentes collections, sont d'un intérêt très inégal (ci-dessous).
Le modèle représenté est toujours le même ; la reine porte une robe en décolleté, ouverte sur une guimpe et une coiffe nouée sous le menton, enserrant le visage, dans une configuration typique des années 1510.
Source des images (de gauche à droite) : (Saint-Petersbourg, musée de l'Ermitage), Base Joconde (Chantilly, Musée Condé) ; (Paris, Conservatoire numérique des arts et métiers) ; Agence photographique de la Rmn (Paris, musée du Louvre) ; Rmn (Paris, musée du Louvre) ; (Ashmolean museum) ; (Ashmolean museum) ; (Osterreichische Nationalbibliothek)
Le portrait a servi de modèle à plusieurs reproductions du XVIe siècle.
On le retrouve dans une miniature du livre d'heures de Catherine de Médicis représentant la reine Claude au centre d'un portrait de famille composé de ses filles (Louise, Madeleine et Marguerite), de sa soeur cadette, Renée (en bas à droite) et d'Eléonore de Habsbourg.
L'image est très artificielle, car les visages représentés appartiennent des époques différentes. Mais en plaçant la reine en situation dominante, c'est le modèle matriarcal incarné par Claude qui est mis à l'honneur, et proposé en modèle par Catherine de Médicis.
Source : (Paris, BnF)
Le portrait a servi de modèle pour différentes peintures aujourd'hui réparties dans différentes collections européennes :
Le musée des Offices de Florence conserve une belle miniature de la reine Claude, peinte dans les années 1570 (première image à gauche) ; le Kunsthistorisches museum détient un portrait de qualité médiocre mais qui s'intégrait dans une galerie de portraits (comme il était courant d'aménager dans les demeures nobiliaires du XVIe siècle) ; le musée du Louvre conserve un petit portrait en pied qui représente la reine dans une robe fleurdelysée.
Source : ? (Florence, musée des Offices) ; Kulturpool (Kunsthistorisches museum) ; (Paris, Musée du Louvre)
Représentation de Claude de France sur le retable de Sainte Chapelle réalisé en émail par Léonard Limousin en 1553
Le médaillon dans lequel est représentée la reine fait partie de la décoration d'un retable destiné à la Sainte Chapelle.
La reine est placée face à son mari dans un médaillon distinct. Leur représentation en priant font pendants à deux autres médaillons illustrant Henri II et Catherine de Médicis. Le retable inscrit le nouveau couple royal dans la continuité de celui incarné trente ans plus tôt par Claude et François de Valois.
Source : Agence photographique de la RMN (Paris, musée du Louvre)
Gisant de Claude de France sculpté par François Carmoy et Pierre Bontemps pour le tombeau commandé par Henri II à la basilique Saint-Denis
En mémoire de ses parents, le roi Henri II fit ériger à la basilique Saint-Denis un tombeau monumental dans lequel le roi François et la reine Claude sont représentés de façon très réaliste.
Il s'agit de transis représentant le couple royal de façon cadavérique. La reine Claude, allongée à côté de son époux est représentée nue, et la face émaciée.
La statue de la reine placée au sommet du tombeau, plus classique dans les formes, est moins intéressante. Claude est représentée en orant, les mains jointes, agenouillée derrière un prie-Dieu. Elle est accompagnée de sa famille, époux, fils et fille. Son visage est moins individualisé que le transi.
La différence de traitement entre les deux statues s'explique par les complications subies par le chantier d'édification du tombeau. Plusieurs sculpteurs se sont succédés pour terminer la décoration de l'édifice et à la mort du roi Henri II, le tombeau n'était pas terminé.
Source des images : Akg-images ; Akg-images ; AGORHA
Article initialement posté en décembre 2007